Les trois stratégies possibles Communication de crise

Publié le par Nadir Moufakkir

Communication de crise

Les trois stratégies possibles

 

 

Pour apprendre à gérer des situations imprévues, les entreprises devraient dans l'idéal réfléchir quelques instants sur des événements possibles et simuler, en conséquence, des scénarios. Des exercices dont l'objectif est d'arrêter des stratégies de communication précises en cas de "crise". A ce petit jeu, chaque entreprise, chaque situation implique donc une stratégie différente. Néanmoins, on peut discerner trois grandes stratégies de communication de crise, avec leurs avantages et leurs inconvénients. Les explications de Didier Heiderich, consultant, créateur du Communication-sensible.com et président de l'Observatoire international des crises.

La reconnaissance

Cette première stratégie consiste à accepter la crise et ce, le plus rapidement possible. "Dans cette stratégie, explique Didier Heiderich, si la presse dévoile la crise en devançant l'entreprise, c'est que la communication de celle-ci est mauvaise et que la crise ne lui appartient déjà plus. Pour mener l'opération, l'entreprise doit donc aller vite et être en mesure de déterminer rapidement si elle est compétente par rapport au moteur de la crise. Ce moteur peut être interne, par exemple lié aux produits de l'entreprise, ou externe, par exemple lié à un contexte politique. Dans chacun des cas, l'axe de communication ne sera pas le même."

De manière générale, la stratégie de la reconnaissance s'appuie sur une communication claire et ferme. Selon le contexte, plusieurs alternatives s'offrent à l'entreprise :

Reconnaître complètement la situation et sa responsabilité. Dans ce cas, assumer les réparations des dommages subis apporte un avantage au point de vue juridique, mais aussi médiatique.

Exprimer son incompréhension, si l'entreprise ne connaît pas les raisons à l'origine de la situation.

Elargir la responsabilité à des acteurs externes, comme les autorités de régulation.

Dissocier les choses en se délestant des responsables s'il le faut. Cette option avait été choisie par Elf dans le cadre de l'affaire Loic le Floc Prigent, son PDG.

Contingenter la crise sur un objet, un lieu, un temps. Le but est alors d'éviter d'élargir le phénomène à d'autres produits, d'autres marques, d'autres usines...

Encore peu employée, cette stratégie de la reconnaissance est pourtant "l'une de celle qui fonctionne le mieux", selon Didier Heiderich. Difficile en effet d'avouer sa responsabilité pour une entreprise. Mais le faire, c'est jouer la carte de la transparence et acquérir une crédibilité auprès des différents publics. Cette stratégie permet également d'éviter une remontée ultérieure d'informations contredisant les premières déclarations. Une situation dans laquelle l'entreprise a énormément à perdre sur le plan de l'image.

 

 

 

 

Le projet latéral

Développée par Thierry Libaert dans son livre Communication de crise (Dunod, 2001), cette stratégie cherche à modifier l'angle de vue de la crise. "Mais elle doit pouvoir être fondée sur la réalité et des faits concrets pour réussir à déplacer le lieu de débat", précise Didier Heiderich.

Pour mener à bien un projet latéral, différentes tactiques sont possibles :

Contre-attaquer et dire à qui profite les faits, soit le plus souvent au concurrent. Cette stratégie est utilisée notamment par les grandes entreprises françaises qui trouvent alors dans la concurrence internationale un alibi naturel.

Reporter la responsabilité à l'extérieur, en orientant les faits vers l'administration, le politique...

Minimaliser sa communication, ou communiquer plus fortement sur un autre registre.

Souligner le fait que le pire a été évité et que la situation aurait pu être largement plus grave si l'entreprise n'avait agi de telle ou telle manière.

Le projet latéral, qui consiste à déporter la crise en dehors du champ de l'entreprise, doit impérativement s'appuyer sur des éléments tangibles. Dans le cas contraire, son utilisation peut s'avérer bien plus dangereuse que la crise elle-même.

Le refus

La stratégie du refus consiste à affirmer qu'il n'y a pas de crise. "Il s'agit alors d'une posture que l'entreprise doit être capable de tenir", précise Didier Heiderich.

Quatre possibilités s'offrent à l'entreprise dans ce scénario :

Garder le silence dès le début de la crise, stratégie choisie par les autorités russes lors de l'accident de la centrale nucléaire de Tchernobyl.

Cesser de parler à partir d'un moment précis et donc ne plus alimenter la crise.

Avancer le principe du chaînon manquant, comme dans l'affaire des paillotes en Corse, où nul ne sait qui a donné l'ordre initial.

Minimiser les effets de la crise, à condition d'être le seul interlocuteur à disposer des données. C'est la formule choisie par le gouvernement lors de la canicule de l'été 2003. Mais les statistiques fournies par les Pompes funèbres ont enrayé le scénario.

Les conséquences d'une telle stratégie peuvent s'avérer extrêmement dommageables, aux niveaux juridique et médiatique, si les faits ressurgissent à plus ou moins long terme et avec une nouvelle lecture des événements. Concrètement, ce scénario du pire se traduira dans la plupart des cas par une perte de crédibilité.

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